Dans la seconde moitié du XIXe siècle, l’amélioration des techniques photographiques offre de nouveaux outils aux architectes et au monde de la construction ou de la restauration d’édifices. Certains photographes se spécialisent alors dans la photographie d’architecture et de chantier et développent ce marché nouveau. Dans ce contexte, Louis Emile Durandelle, actif à Paris entre 1860 et 1890, illustre cette adaptation de certains photographes à la demande des architectes dont l’utilisation des images d’architecture est alors en transition entre l’héritage du siècle précédent où les gravures étaient essentiellement diffusées dans des publications spécialisées et des pratiques nouvelles de diffusions plus larges des photographies d’architecture. La représentation architecturale connaît alors elle-même une transition importante, bouleversée notamment par la rapidité d’exécution des photographies. Ayant réalisé plus de dix mille photographies de reproductions d’objets d’art et d’architecture et un nombre difficile à évaluer de portraits-cartes, Durandelle joue par l’abondance de sa production et sa présence sur des chantiers parisiens majeurs un rôle important dans l’évolution des usages de la photographie par le monde de la construction. On lui doit un important corpus photographique fournissant de précieuses informations au sujet des travaux de l’Opéra Garnier, du Sacré-Cœur de Montmartre, du Mont-Saint-Michel, du Comptoir d’Escompte de la ville de Paris, de la gare Saint-Lazare, de l’Hôtel-Dieu de Paris, de la Tour Eiffel, du Palais du Louvre ou encore du musée des Beaux-Arts d’Amiens. L’étude retrace sa biographie, son activité de photographe de chantier, d’édifices achevés et de décors monumentaux, depuis sa réalisation des clichés jusqu’à leurs usages variés faits par ses commanditaires. Elle replace l’activité du photographe parmi celles de ses pairs, à une époque où le métier de photographe d’architecture nécessite une importante maîtrise technique notamment pour lutter contre la parallaxe et les distorsions de la perspective. Elle analyse la manière dont certains architectes, certaines administrations ou certains entrepreneurs du bâtiment ont fait usage des clichés de Durandelle pour servir leurs intérêts économiques et professionnels aussi bien lors de la conception architecturale qu’au cours du chantier de construction ou pour promouvoir leur réalisation une fois l’édifice achevé.
Charlotte Leblanc
Docteur en Histoire de l’Art.
Recherches actuelles en Histoire de l’architecture : usages et pratiques sur les chantiers de construction au XIXe siècle.
Thèse de doctorat sur l’usage de la photographie d’architecture.
Enseignement de l’Histoire de l’architecture XIXe-XXe s. à l’Université de Bourgogne-Franche-Comté.